À la suite de deux ordonnances « covid-19 », les employeurs peuvent différer la mise en œuvre de certaines de leurs obligations arrivant à échéance entre le 12 mars et le 23 juin 2020 inclus. La Direction Générale du Travail (DGT) précise quelles sont les obligations concernées dans les domaines de la santé et de la sécurité au travail.
Rappel sur le report des délais pour faire face à l’épidémie de Covid-19
La crise sanitaire a conduit le gouvernement à reporter divers délais et à définir pour cela une « période juridiquement protégée » qui court à compter du 12 mars jusqu’au 23 juin 2020 inclus (ord. 2020-306 du 25 mars 2020, art. 1 modifié ; ord. 2020-560 du 13 mai 2020, art. 1er, 1°, a).
Ainsi, les formalités concernées, et qui auraient dû être accomplies entre le 12 mars et le 23 juin 2020, seront réputées avoir été faites à temps si elles sont effectuées dans un délai qui ne peut excéder, à compter du 24 juin 2020, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de 2 mois.
Le temps écoulé avant le 12 mars importe peu : ce n’est pas le reliquat qui court à compter du 24 juin, mais un nouveau délai complet. Juridiquement parlant, il s’agit d’une « interruption » de délai (et non d’une suspension).
Précisions de la DGT pour les obligations périodiques en matière de santé et de sécurité au travail
Dans les domaines de la santé et de la sécurité au travail, la Direction générale du travail (DGT) indique quelles sont les obligations périodiques concernées par l’aménagement des délais rappelé ci-avant (inst. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, BO Travail 2020/5 du 30 mai 2020).
En d’autres termes, elle liste les obligations « santé et sécurité », arrivant à échéance entre le 12 mars et le 23 juin 2020, que les employeurs peuvent différer jusqu’au 23 août au plus tard (c’est-à-dire dans les deux mois suivant la période dite « juridiquement protégée »).
La DGT rappelle qu’il s’agit là d’une simple possibilité. Chaque employeur apprécie s’il en use au regard notamment du résultat de l’évaluation des risques à laquelle il est tenu (c. trav. art. L. 4121-2 et L. 4121-3), et de sa capacité ultérieure à réaliser ses obligations dans le délai imparti.
Le ministère du Travail traite aussi du sujet dans son document « foire aux questions » (FAQ) publié sur son site internet (www.travail.gouv.fr).
Pas d’aménagement pour les « primo-obligations » et les autres obligations non soumises à un délai
Lorsqu’il n’existe pas de délai d’exécution pour réaliser un acte, une mesure, une obligation ou une formalité, le dispositif d’aménagement des délais ne s’applique logiquement pas.
Ainsi, les « primo-obligations » ne sont pas concernées (ex. : première formation avant affectation au poste de travail, vérifications initiales, premières demandes de certification ou d’accréditation).
D’autres dispositions du code du travail ne relèvent pas du champ d’application du dispositif d’aménagement des délais. Tel est le cas par exemple, du renouvellement de la formation de secouriste (c. trav. art. R. 4224-15) ou du certificat de sauveteur secouriste du travail.
La DGT précise à ce propos que, si un certificat de sauveteur secouriste du travail arrive à échéance entre le 12 mars et le 23 juin 2020, l’employeur peut tout de même décider, en concertation avec la médecine du travail, de maintenir le salarié concerné dans l’équipe de 1er secours si celui-ci conserve les connaissances et la capacité nécessaires pour intervenir en cas d’urgence pendant cette période.
Renouvellement des formations, certificats ou habilitations
Relève du mécanisme de report des délais, le renouvellement :
-des formations,
-des certificats,
-des habilitations.
Par exemple, le renouvellement, en principe semestriel, des exercices destinés à reconnaître les caractéristiques du signal sonore d’alarme générale relève du mécanisme de report (c. trav. art. R. 4227-39).
S’agissant des formations, la DGT précise que les travailleurs concernés peuvent être maintenus sur le poste de travail en attendant le renouvellement de leur formation (inst. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, § I, A). Par exemple, un salarié ne peut pas être affecté à des travaux hyperbares s’il n’y a jamais été formé, mais celui qui aurait dû renouveler son certificat d’aptitude à l’hyperbarie pendant la période 12 mars-23 juin 2020, peut continuer à intervenir (c. trav. art. R. 4461-27).
Le cas échéant, l’employeur réorganise les échéances des autres renouvellements prévus au cours du second semestre de l’année 2020 avec l’objectif d’assurer une formation continue adaptée et cohérente.
Lorsque deux renouvellements doivent intervenir au cours de la période 12 mars-23 juin 2020, l’employeur a la possibilité de reporter uniquement le premier renouvellement, l’administration considérant que celui-ci n’ayant pas eu lieu, le second n’a plus lieu d’être pendant cette période.
À noter que la DGT répertorie sous forme de tableau les obligations périodiques visées et donne des exemples sous forme de frise chronologique (inst. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, § I, B).
Renouvellement des vérifications et contrôles
Le renouvellement des vérifications et contrôles relève du dispositif d’aménagement des délais. L’administration en dresse une liste sous forme de tableau (ex. : contrôle en principe annuel des installations d’aération et d’assainissement des locaux de travail à pollution non spécifique) (c. trav. art. 4222-2).
Ainsi, le renouvellement qui devait intervenir entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 est réputé avoir été accompli à temps dès lors qu’il intervient au plus tard le 23 août 2020 (inst. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, § II, A et B). Par exemple, l’employeur ne peut pas mettre en service un appareil de levage qui n’a pas fait l’objet d’une vérification initiale (c. trav. art. R. 4323-23). En revanche, un appareil de levage qui a fait l’objet d’une vérification initiale mais dont la vérification générale périodique n’a pas pu être réalisée, peut continuer à être utilisé.
Si la périodicité de la vérification :
-est mensuelle, l’employeur a au plus tard jusqu’au 23 juillet 2020 ;
-est trimestrielle, l’employeur doit la faire au plus tard le 23 août 2020.
Autres obligations périodiques concernées
Sont également concernés par le report de délais :
-le renouvellement des contrôles, des mesurages ou de la surveillance des expositions professionnelles (ex. : contrôle en principe annuel des valeurs limites d’exposition professionnelle aux agents chimiques dangereux) (c. trav. art. R. 4412-27 ; inst. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, § III, A et B) ;
-le renouvellement d’études de sécurité spécifiques, d’inspections et réunions périodiques (ex. : inspections et réunions trimestrielles de coordination organisées par le chef de l’entreprise utilisatrice lorsque l’ensemble des opérations des entreprises extérieures présentes dans un établissement conduit à l’emploi de travailleurs pour une durée totale supérieure à 90 000 h pour les 12 mois à venir) (c. trav. art. R. 4513-5 ; ; inst. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, § IV, A et B) ;
-les certifications et accréditation conférant à l’entreprise l’autorisation d’exercer son activité pour un tiers ou pour son compte (ex. : certification des organismes de formation des travailleurs à la prévention des risques liés à l’amiante) (c. trav. art. R. 4412-141 ; inst. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, §§ V et VI).
Cas des dosimètres permettant de surveiller l’exposition aux rayonnements ionisants
L’employeur sera réputé avoir rempli son obligation de renouveler les dosimètres qui aurait dû intervenir à l’échéance de la période de port (le premier jour du mois suivant) au cours de la période 12 mars 2020 -23 juin 2020 (soit le 1er avril, le 1er mai, ou le 1er juin), s’il procède à leur remplacement à la date de la première exigence de renouvellement qui n’est plus couverte pas la période juridiquement protégée (c. trav. art. R. 4451-64 et s.).
Par exemple, un dosimètre mensuel, attribué le 1er mars 2020, qui aurait dû être renouvelé le 1er avril, pourra être renouvelé le 1er juillet (inst. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, § III, C).
Au plus tard le 23 août 2020 ou avant le 23 août 2020 ?
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À la lecture des deux ordonnances sur les reports de délais (ord. 2020-306 du 25 mars 2020, art. 1 modifié ; ord. 2020-560 du 13 mai 2020, art. 1er, 1°, a), il faut comprendre, à notre sens, que la période maximale de 2 mois, courant à compter du 24 juin 2020, dont bénéficie l’employeur pour effectuer les actes et formalités qu’il n’a pas pu accomplir entre le 12 mars et 23 juin 2020 inclus, s’achève au plus tard le 23 août 2020. C’est cette date que nous avons choisi de prendre pour repère, tandis que la DGT dans son instruction du 15 mai 2020, fait état d’obligations à remplir « avant le 23 août 2020 ». Cela étant, dans ses « figures d’illustration », elle mentionne le 23 août 2020 comme une « date limite ».
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Instr. DGT/CT2/CT3 2020-70 du 15 mai 2020, BO Travail 2020/5 du 30 mai 2020 https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/bo_travail_2020-5.pdf ; « Mesures de prévention-santé « hors COVID-19 », FAQ, www.travail.gouv.fr