Le ministère du travail a diffusé un protocole national de déconfinement pour aider et accompagner les entreprises du secteur privé – quelles que soient leur taille, leur activité et leur situation géographique – à reprendre leur activité tout en protégeant la santé de leurs salariés grâce à des règles universelles.
Conformément aux principes généraux de prévention en matière de santé et de sécurité au travail, la démarche de déconfinement doit conduire à éviter les risques d’exposition au virus, à évaluer ceux qui ne peuvent être évités, et à privilégier prioritairement les mesures de protection collective plutôt qu’individuelle, notamment organisationnelles : mise en place du télétravail si possible, à défaut séquencement des activités et mise en place d’horaires décalés pour limiter l’affluence et la concentration des personnes.À noter : Le protocole vient en complément des guides métiers disponibles sur le site du ministère du travail et élaborés en partenariat avec les fédérations professionnelles et les partenaires sociaux.
Dans un premier temps, le protocole rappelle les mesures barrières et de distanciation sociale, socle du déconfinement. Ces règles s’appliquent à toute la population et les travailleurs sont donc nécessairement concernés. Sont ainsi rappelées, entre autres règles, la nécessité de se laver les mains régulièrement au savon ou avec un gel hydroalcoolique, d’éviter de se toucher le visage, de respecter les règles de distanciation physique (ne pas se serrer la main, ne pas s’embrasser, laisser au moins 1 mètre entre les personnes), d’aérer régulièrement, de désinfecter les objets et les surfaces. En cas de symptôme lié au Covid-19, il faut rester chez soi et contacter son médecin, ou le 15 en cas de symptômes graves.
Le protocole indique également les règles d’hygiène élémentaire (aération des locaux), de nettoyage quotidien (à l’aide d’un produit contenant un tensioactif), voire de désinfection si l’évaluation des risques que doit établir l’employeur le justifie. Le protocole détaille les normes des produits d’entretien qui doivent être utilisés.
Respecter la distanciation sociale impose de gérer les flux de travailleurs
Le protocole fixe la jauge, c’est à dire le nombre de travailleurs qu’un lieu de travail peut accueillir simultanément. Cette occupation maximale est fixée à 4 m² minimum par personne, ce qui doit en principe permettre de laisser au moins 1 mètre autour d’une personne, dans toutes les directions. La surface à prendre en compte par l’employeur est la surface résiduelle de l’espace considéré, c’est à dire la surface effectivement disponible, déduction faite des parties occupées par le mobilier, mais aussi par les zones de circulation, etc. Pour un bâtiment de bureaux, le protocole évalue ainsi la surface résiduelle à environ 80 % de la surface totale. Lorsque certaines situations comportent un risque non maitrisable de rupture de la distanciation, des mesures complémentaires comme le port de masques doivent être mis en place.
Exemple : Dans un open-space de 700m² sont installés 50 bureaux de 2 m² chacun, nécessitant chacun 2m² au sol supplémentaires pour que le salarié puisse vaquer à ses occupations. Les armoires/vestiaires occupent 1,5 m² par bureau. L’open-space a une salle de réunion de 100m² et 3 salles d’isolement de 30 m² chacune. La surface dédiée à la circulation est de 100 m².
La surface résiduelle est donc de : 700 – (4×50) – (50×1,5) – 100 – (3×30) – 100 = 135 m².
La jauge maximale est donc égale à (Surface résiduelle / 4) = 135 m² / 4 m² = 33 personnes.
Le travail doit être organisé pour que les 50 personnes travaillant habituellement sur cet open-space ne soient jamais plus de 33 sur le lieu de travail (par exemple : 25 salariés présents du lundi au mercredi midi, puis en télétravail le reste de la semaine et inversement pour les 25 autres salariés, cette organisation laissant des marges pour passer de 25 à 33 en fonction des contraintes de transports en commun des salariés).
L’employeur doit organiser des plans de circulation au sein de l’entreprise
Les mouvements de personnes présentent des risques puisqu’ils peuvent être l’occasion de rompre les règles de distanciation. Dans ces conditions, les flux doivent faire l’objet d’une analyse rigoureuse, être anticipés pour les éviter ou les réduire. Des plans de circulation doivent être mis en place dont chaque travailleur doit être informé. Il faut identifier les processus d’arrivée – et de départ- afin d’éviter les goulots d’étranglement.
Exemple : Dans un immeuble de grande hauteur, si les 3 cabines d’ascenseurs ne peuvent transporter – en respectant les règles de distanciation physique – que 2 personnes, cette contrainte conditionne les modalités d’organisation liées aux horaires d’arrivée et de départ, mais aussi ceux de début de réunion.
Le protocole fournit un véritable guide des bonnes pratiques suivant les lieux ou situations concernés. Ainsi, si dans tous les cas, un principe de séparation des flux doit être respecté (sens unique de circulation, organisation des horaires, limitation du nombre de personnes dans les ascenseurs, …), d’autres règles concernent en particulier l’entrée sur site (condamnation des tourniquets, marquage au sol,…), les locaux communs (horaires de pause échelonnés pour éviter les affluences), les bureaux (privilégier une seule personne par bureau, à défaut éviter le face à face ; utilisation de plexiglas de séparation). Certaines règles d’hygiène sont également indiquées : aération 15 minutes 3 fois par jour, nettoyage 2 fois par jour des rampes d’escalier, laisser les portes ouvertes pour que les salariés évitent de toucher les poignées, vecteurs de contamination.
Outre ces règles générales, le protocole envisage certaines situations particulières, par exemple en cas d’intervention d’un tiers (dépannage), un balisage de sa zone d’intervention doit être réalisé et l’intervenant doit respecter le plan de circulation. Autre exemple, en cas de réception dans certains services internes (ressources humaines, informatique,…), la prise de rendez-vous doit être priorisée.
L’utilisation des équipements de protection individuelle
Le protocole indique à plusieurs reprises que les mesures de protection collective doivent être privilégiées, que celles-ci soient techniques (écrans physiques de séparation, espacement,…) ou organisationnelles (horaires décalés pour limiter l’affluence et la concentration des personnes). Les équipements de protection individuelle (EPI) ne peuvent être qu’un complément et ne peuvent pas s’y substituer.
À noter : Pour les EPI à usage unique, l’employeur doit organiser leur approvisionnement et leur évacuation. Il faut notamment conserver les déchets souillés dans un double sac poubelle, pendant 24h, dans un espace réservé avant élimination avec les ordures ménagères.
Concernant le cas particulier des masques de protection, leur utilisation est obligatoire si la distanciation physique d’1 mètre ne peut être respectée. Le protocole rappelle la nécessité de respecter les gestes barrières et les règles de bonne utilisation des masques pour garantir leur efficacité : respect des consignes d’entretien pour les masques lavables (nombre de lavages, température,…), ajustement (il faut couvrir le nez et la bouche), ne pas toucher le masque lorsqu’il est porté (risque de contamination), respecter le sens d’utilisation (ne pas mettre le visage en contact avec la face externe).
À noter : Le choix du type de masque dépend de l’évaluation des risques professionnels effectuée par l’employeur. Les masques de type FFP2 sont destinés aux professionnels de santé. Les masques FFP1, ou les masques alternatifs à usage non sanitaire (dits “grand public”), peuvent être fournis par l’employeur, notamment pour les salariés en contact régulier avec le public.
Comme les masques, les autres EPI (gants, lunettes, surblouses, charlottes,…) doivent être utilisés en cas d’impossibilité de respecter en permanence les gestes barrières ou lorsque l’activité le nécessite. Le protocole recommande, dans la mesure du possible, d’éviter de porter des gants qui donnent un faux sentiment de protection et deviennent vecteurs de transmission s’ils sont mal utilisés (par exemple en se touchant le visage).
Le rôle des entreprises dans le suivi et le dépistage du coronavirus
Les employeurs ont un rôle à jouer en matière de prévention : relayer les messages des autorités sanitaires, inviter les salariés symptomatiques à ne pas venir travailler, évaluer les risques de contamination sur les lieux de travail, etc… En revanche, le protocole précise que les campagnes de dépistage ne peuvent pas être organisées par les employeurs.
Le protocole établit une procédure de prise en charge des personnes symptomatiques :
– Isoler la personne dans une pièce dédiée, en appliquant immédiatement les gestes barrières ; garder une distance raisonnable avec elle (1 mètre) avec port d’un masque « grand public » ou chirurgical si disponible ;
– Mobiliser le professionnel de santé de l’établissement, un sauveteur/secouriste du travail formé au risque Covid ou le référent Covid selon l’organisation mise en place, et lui fournir un masque ;
– En l’absence de signes de gravité, contacter le médecin du travail ou demander à la personne de contacter son médecin traitant pour avis médical. Si confirmation d’absence de signes de gravité, organiser son retour à domicile en évitant les transports en commun ;
– En cas de signes de gravité (détresse respiratoire), prévenir le Samu : l’assistant de régulation passera un médecin et indiquera la conduite à tenir ;
– Si l’envoi des secours est décidé, organiser leur accueil et rester à proximité de la personne pour la surveiller ; en cas d’éléments nouveaux importants, rappeler le 15 ;
– Après prise en charge de la personne, contacter le service de santé au travail et suivre ses consignes, y compris pour le nettoyage du poste de travail et le suivi des salariés ;
– S’il y a confirmation de covid, l’identification et la prise en charge des personnes ayant été en contact seront organisées par les acteurs de niveau 1 et 2 du contact-tracing (médecin prenant en charge le cas et plateformes de l’assurance maladie). Ceux-ci pourront s’appuyer sur les matrices des contacts en entreprise réalisées en amont ainsi que sur la médecine du travail pour faciliter l’identification des contacts et leur qualification (« à risque » ou « à risque négligeable »).
Par ailleurs, le protocole indique qu’un contrôle de température à l’entrée des établissements est déconseillé, puisqu’il est recommandé à toute personne de mesurer elle-même sa température. Toutefois, les entreprises peuvent organiser un contrôle de la température des personnes entrant sur leur site, sous conditions. Ce type de contrôle doit respecter les dispositions du Code du travail (règlement intérieur), être proportionné à l’objectif recherché et offrir toutes les garanties requises aux salariés (information préalable, absence de conservation des données). Quoi qu’il en soit, le salarié est en droit de refuser le contrôle de température et si l’employeur, devant ce refus, ne le laisse pas accéder à son poste, il peut être tenu de lui verser le salaire correspondant à sa journée de travail.