Un dirigeant d’entreprise peut tirer diverses formes de revenus de son activité. Selon sa situation, il peut d’ailleurs les panacher entre elles. En société, le choix est plus étendu, mais souvent encadré de procédures à respecter.
Recevoir un salaire
L’entrepreneur individuel est seul à décider
L’exploitant individuel est libre de choisir de se verser un salaire régulier ou non, ce qui ne l’empêche pas de prélever des fonds dans la caisse quand il le veut. Salaire ou prélèvements, il ne s’agit que d’une appréhension anticipée d’une partie des bénéfices lui revenant, en tout état de cause, en fin d’année.
Qui décide de la rémunération pour les mandataires sociaux ?
En SARL :
La rémunération du gérant peut être fixée par les statuts. En pratique, cependant, il est fréquent que les statuts posent le principe d’une rémunération et laissent à l’assemblée (vote acquis avec plus de la moitié des parts) le soin d’en déterminer le montant, les modalités et de la modifier. Les juges ont toutefois admis qu’une rémunération fixée sans autorisation préalable de l’AG puisse être régularisée par une décision ultérieure des associés.
- En EURL : La décision appartient à l’associé unique et est ensuite transcrite sur le registre.
- Vote du gérant : La rémunération du gérant et sa modification ne sont pas soumises à la procédure des conventions réglementées. Le gérant peut prendre part au vote de ces décisions.
En SAS :
Les statuts fixent les conditions de la rémunération du président : ils peuvent arrêter le mode de calcul ou laisser à une décision collective le soin d’en fixer le montant (majorité requise prévue par les statuts).
SASU : L’associé unique décide seul, puis sa décision est répertoriée au registre.
En SNC :
La rémunération du gérant est fixée par les statuts, ou par une décision ultérieure (vote acquis à l’unanimité, sauf clause contraire des statuts).
Etre aussi salarié
Le fisc et la sécurité sociale assimilent à des salariés les gérants minoritaires et égalitaires de SARL ainsi que les dirigeants de SAS. Pourtant, juridiquement, ces mandataires sociaux ne sont pas de vrais salariés : s’ils perdent leur poste, ils ne peuvent prétendre aux allocations chômage versées par le Pôle Emploi. Pour cela, il faut que, en sus de leur mandat social, ils aient un contrat de travail. La rémunération perçue à ce titre obéit au droit du travail.
Percevoir des dividendes
En sa qualité d’associé, le dirigeant de société a vocation à recevoir une quote-part des bénéfices au prorata de sa participation au capital. L’attribution de dividendes suppose que l’assemblée générale se réunisse pour approuver les comptes et procède à l’affectation des résultats.
Apports en industrie. En SARL, SAS et SNC, celui qui ne peut apporter ni capitaux ni biens en nature peut s’associer quand même par des apports en industrie (mise à disposition de son travail, de ses connaissances et relations), ce qui lui permettra de participer aux résultats ; à charge pour lui de contribuer aux pertes. Sauf clause contraire des statuts, la part de bénéfices de l’apporteur en industrie est égale à celle de l’associé qui a apporté le moins.
Régime social
Les dividendes distribués aux associés de sociétés dirigées par un travailleur non salarié, leur conjoint, leur partenaire pacsé ou leurs enfants mineurs non émancipés sont partiellement soumis à cotisations sociales. Est assujettie la part des revenus distribués supérieure à 10 % du capital social, des primes d’émission et des comptes courants.
Régime fiscal
Depuis le 1er janvier 2018, le régime fiscal des dividendes a été modifié.
Profiter d’avantages en nature
Qu’est-ce qu’un avantage en nature ?
Le dirigeant de société bénéficie d’un avantage en nature quand son entreprise lui permet de réaliser une économie en prenant à sa charge certaines de ses dépenses personnelles : le dirigeant utilise gratuitement à des fins privées un bien de la société (ex. : véhicule de fonction, téléphone portable, ordinateur), la société supporte des frais qui auraient normalement incombé au dirigeant (ex. : voyage, notes personnelles de restaurant ou d’hôtel) ou encore, elle lui fait profiter d’un bien qu’il aurait payé plus cher sur le marché (ex. : logement, nourriture, remise de produits de l’entreprise, tarifs préférentiels).
Attention à l’abus de biens sociaux. Risque 5 ans de prison et 375 000 € d’amende, le dirigeant qui, de mauvaise foi et à des fins personnelles, fait des biens de la société un usage qu’il sait contraire à l’intérêt de celle-ci (c. com. art. L. 241-3).
Régime fiscal
Les avantages en nature accordés aux dirigeants sont imposables à l’impôt sur le revenu. Ils sont normalement évalués pour leur valeur réelle. Pour les gérants minoritaires et égalitaires de SARL ainsi que pour les dirigeants de SAS, l’avantage en nature correspondant au véhicule et aux outils issus des NTIC peut faire l’objet d’une évaluation forfaitaire.
Régime social
L’avantage en nature donne lieu à cotisations sociales.
Quel que soit le statut juridique du dirigeant, une évaluation forfaitaire selon les barèmes officiels est admise s’il cumule son mandat social avec un contrat de travail et si l’avantage en nature est octroyé au titre de ce contrat et en tenant compte de la seule rémunération perçue à ce titre.
À défaut de contrat de travail, les gérants majoritaires doivent évaluer tous les avantages en nature pour leur montant réel.
Les gérants minoritaires et égalitaires de SARL affiliés au régime général de sécurité sociale ainsi que les dirigeants de SAS peuvent utiliser les barèmes forfaitaires, mais seulement pour les avantages véhicules et NTIC. Toutefois, pour les cotisations sociales dues au titre des périodes d’activité courant à compter du 1er janvier 2020, l’avantage en nature nourriture peut être évalué de façon forfaitaire pour ces dirigeants sociaux.
Évaluation de l’avantage nourriture (2022) | ||||||||
Est évalué à 5 € par repas ou 10 € par jour (3,76 € par repas dans les hôtels-cafés-restaurants). | ||||||||
Évaluation de l’avantage en nature logement : barème 2022 | ||||||||
Rémunération mensuelle brute (en €) | ||||||||
Inférieure à 1 714 | De 1 714 à 2 056,79 | De 2 056,80 à 2 399,59 | De 2 399,60 à 3 085,19 | De 3 085,20 à 3 770,79 | De 3 770,80 à 4 456,39 | De 4 456,40 à 5 141,99 | À partir de 5 142 | |
Avantage en nature pour une pièce principale (en €) | ||||||||
72,30 | 84,40 | 96,30 | 108,30 | 132,70 | 156,60 | 180,80 | 204,70 | |
Avantage en nature pour plusieurs pièces principales (en €) | ||||||||
38,70 | 54,20 | 72,30 | 90,20 | 114,40 | 138,20 | 168,50 | 192,60 | |
Évaluation forfaitaire de l’avantage en nature véhicule | |
Forfait annuel | Dépenses réelles |
Véhicule acheté : 9 % du coût d’achat (6 % si véhicule de plus de 5 ans) et, lorsqu’elles sont prises en charge par l’employeur, les dépenses de carburant soit en frais réels, soit suivant un forfait global de 12 % du coût d’achat (9 % si véhicule de plus de 5 ans). | A/ Véhicule acheté : 20 % du coût d’achat par an (10 % si le véhicule a plus de 5 ans), assurance, frais d’entretien et, le cas échéant, frais de carburant. |
Véhicule loué avec ou sans option d’achat* : 30 % du coût global annuel comprenant la location, l’entretien, l’assurance du véhicule et les dépenses de carburant payées par l’employeur soit en frais réels, soit suivant un forfait global de 40 % du coût global annuel (location, entretien, assurance du véhicule et carburant). |
B/ Véhicule loué avec ou sans option d’achat : coût global annuel de la location, l’entretien et l’assurance du véhicule et des frais de carburant. Avantage en nature : A ou B × kilométrage privé annuel/kilométrage total. |
* Plafonnement à la valeur résultant de la règle applicable en cas de véhicule acheté. | |
Évaluation forfaitaire de l’avantage en nature nouvelles technologies | |
Forfait annuel égal à 10 % du coût d’achat public TTC (ou du coût de l’abonnement). Le forfait est arrondi à la dizaine de centimes d’euro la plus proche. À proratiser en fonction du nombre de mois sur l’année. |
NOTES DE FRAIS PROFESSIONNELS SOUS SURVEILLANCE
Les régimes fiscal et social des dépenses strictement inhérentes à l’activité professionnelle sont plus favorables que ceux des avantages en nature : ces charges, déductibles pour l’entreprise, sont exonérées de cotisations. Aussi, en pratique, quand un bien est utilisé à la fois à des fins privées et professionnelles, il convient d’isoler la charge constituant un avantage en nature. Compte tenu du régime de faveur des notes de frais, la tentation est parfois grande de les « gonfler » un peu (repas d’affaires, déplacements…). Il ne sera cependant pas facile d’échapper à la vigilance du fisc et de l’URSSAF qui, en cas de contrôle, épluchent scrupuleusement ce poste de dépenses.
Détenir un compte courant d’associé rémunéré
Objet
Le compte courant d’associé permet à l’associé de prêter à sa société, notamment des fonds qu’il laisse à sa disposition (rémunération, dividendes…). En contrepartie, l’associé perçoit des intérêts.
Les intérêts versés aux associés sont déductibles du résultat de l’entreprise dans certaines limites publiées officiellement. Exceptionnellement, les intérêts versés aux associés sont, toutefois, entièrement déductibles lorsque les fonds avancés par l’associé proviennent d’un emprunt contracté à titre personnel auprès d’une banque.
Pour l’associé, les intérêts bruts perçus depuis le 1er janvier 2018 sont soumis à un prélèvement forfaitaire obligatoire de 12,8 % non libératoire de l’IR majoré de 17,2 % de prélèvements sociaux. Ce prélèvement représente un acompte sur l’impôt dû. Les intérêts perçus au cours d’une année sont taxés l’année suivante comme des revenus mobiliers. Ils sont soumis au prélèvement forfaitaire unique de 30 % (12,8 % au titre de l’IR + 17,2% au titre des prélèvements sociaux), sauf option pour le barème progressif de l’IR au moment du dépôt de la déclaration de revenus. Le prélèvement de 12,8 % payé à la source s’impute sur l’impôt final. L’excédent éventuel est restitué.
Fonctionnement
Les modalités de fonctionnement du compte sont en général prévues par les statuts. À défaut, une convention détaillée doit être signée entre l’associé et la société et être soumise à la procédure spécifique des conventions réglementées. À peine de nullité, ce compte ne peut jamais être débiteur.
- L’associé prêteur peut, en théorie, exiger d’être remboursé à tout moment quel que soit l’état financier de la société. En pratique, cependant, les juges considèrent en général que le remboursement ne doit pas mettre en péril la société.
Pour éviter un brusque retrait des fonds, il peut être exigé que la demande de remboursement respecte un certain préavis. Ou encore, à l’unanimité des associés, une clause de blocage peut être prévue pendant quelques années (au-delà de 5 ans, il y a des avantages fiscaux) ou une clause de cession d’antériorité de créance par laquelle l’associé renonce à demander le remboursement avant qu’un autre créancier ne soit désintéressé.
- Réglementation bancaire.Tout associé d’une SNC peut lui prêter des fonds.
Dans les SARL et les sociétés par actions (SA, SAS et SCA), cette possibilité était réservée aux associés ou actionnaires détenant plus de 5 % du capital. Cette condition a été supprimée depuis le 24 mai 2019 par la loi PACTE 2020-486 du 22 mai 2019. S’agissant des mandataires sociaux, les comptes courants n’étaient envisageables que pour les gérants, les administrateurs, les membres du directoire ou du conseil de surveillance. Depuis le 24 mai dernier, ils le sont également pour les directeurs généraux et directeurs généraux délégués de SA ainsi que pour les présidents de SAS.
- Départ de l’associé.Ce n’est pas parce que l’associé cède ses parts qu’il cède aussi le solde créditeur de son compte courant. Il faut le prévoir dans l’acte de cession, ou un document séparé, et le notifier à la société par huissier (ou acceptation dans un acte notarié).
Obtenir le paiement de biens ou de services rendus
Percevoir des loyers pour avoir loué ses murs ou son fonds à sa société, toucher des royalties pour lui avoir concédé l’exploitation d’un brevet, agir envers elle en tant que prestataire de services… Toute une série de contrats permet au dirigeant d’encaisser des revenus de sa société. Mais il doit alors impérativement respecter une procédure de contrôle spécifique destinée à éviter les conflits d’intérêts.
Une convention réglementée
Les contrats (contrat de travail, bail, location-gérance, licence de marque, concession de brevet, convention de compte courant…) entre une SARL ou une SAS et un de ses dirigeants (mais aussi un simple associé dans une SARL ou un actionnaire disposant d’une fraction de droits de vote supérieure à 10 % dans les SAS) sont soumis à contrôle. Ils doivent respecter une procédure d’approbation par les autres associés, destinée à leur permettre de s’assurer que le dirigeant n’a pas profité de sa position pour s’octroyer, à travers ce contrat, des avantages exorbitants préjudiciables à la société. Seuls échappent à cette obligation les contrats courants (c’est-à-dire entrant dans l’activité de la société, telle que définie par son objet social) conclus à des conditions normales (c’est-à-dire ne comportant pas au profit du dirigeant concerné un gain exorbitant ou des conditions exceptionnelles).
Régime fiscal
Société
Pour la société, les sommes versées au dirigeant au titre d’une convention réglementée constituent des charges déductibles dès lors qu’elles correspondent à des actes normaux de gestion et ne sont pas excessives.
Dirigeant
Pour le dirigeant, ces sommes sont imposées à l’IR dans la catégorie correspondant à la nature de l’activité (ex. : la redevance d’une location-gérance est imposée en tant que BIC, des honoraires de conseil comme BNC). La modicité des sommes peut permettre au dirigeant de leur appliquer le régime de la micro-entreprise.
Régime social
La nature des sommes détermine leur assujetissement ou non à cotisations, le cas échéant, en appliquant les règles des pluriactifs. Ainsi, une redevance de location-gérance supporte des cotisations si le loueur occupe dans la société une place lui permettant de participer à l’exploitation du fonds loué.